Dans son récent arrêt n° 7/2016 du 21 janvier 2016, la Cour Constitutionnelle a confirmé que l’article 1382 du Code civil ne peut être interprété comme obligeant le juge judiciaire à limiter à 1 euro symbolique la réparation du dommage moral subi par une association de défense d’un intérêt collectif, comme la défense de l’environnement.

Les faits ayant donné lieu à l’arrêt peuvent être résumés comme suit : une association de défense de la nature réclamait le paiement d’une somme de 1 900 euros à titre d’indemnité pour le préjudice matériel et moral contre des prévenus, chasseurs, poursuivis pour des pratiques cynégétiques immorales.

Plusieurs infractions étaient relevées comme la possession de faisans non réglementaires et l’installation dans un bois, de volières ouvertes non réglementaires.

Considérant que le préjudice moral subi par une association de défense de l’environnement ne pouvait être indemnisé que de manière symbolique, par l’octroi d’un euro, le juge répressif a adressé une question préjudicielle à la Cour Constitutionnelle.

Dans son arrêt n° 7/2016, la Cour rappelle que « la victime a droit, en règle, à la réparation intégrale du préjudice qu’elle a subi. Le juge évalue in concreto le préjudice causé par un fait illicite » (B.6.1) et que « pour qu’un dommage puisse être indemnisé sur la base de l’article 1382 du Code civil, il doit avoir été causé à ‘ autrui ‘ et il doit donc toucher personnellement le demandeur » (B.7.2).

La Cour poursuit son développement en constatant que l’association qui défend la protection de la nature se trouve dans une situation différente de celle d’un citoyen ordinaire lorsqu’elle réclame la réparation d’un préjudice, dès lors que l’objet qu’elle défend (la protection de la nature) n’appartient à personne en particulier.

Dès lors, si la Cour confirme qu’une telle association peut subir un dommage moral et en demander réparation, elle précise que ledit dommage moral présente les particularités suivantes :
– Il est porté à la nature et lèse la société tout entière,
– il est difficilement évaluable avec une précision mathématique parce qu’il s’agit de pertes non économiquement exprimables.

Cependant, selon la Cour, « (b)ien qu’il ne soit pas possible d’évaluer exactement le dommage subi dans le cas d’une atteinte portée à des éléments de l’environnement qui n’appartiennent à personne et bien que le dommage moral de la personne morale ne coïncide pas avec le dommage écologique réel, il n’est pas impossible pour le juge d’évaluer concrètement le dommage moral subi par l’association de défense de l’environnement. » (B.10.1).

Si parfois le dommage moral retenu peut être limité à l’euro symbolique, il ne peut être posé comme principe que ce dommage ne pourrait pas, au vu des éléments de circonstances, être supérieur.

« Une telle limitation affecterait aussi de manière disproportionnée les intérêts des associations de défense de l’environnement concernées, qui jouent un rôle important dans la sauvegarde du droit à la protection d’un environnement sain reconnu par la Constitution » (B.10.3).