Par son récent arrêt n° 91/2016 du 9 juin 2016, la Cour Constitutionnelle renforce les garanties dont bénéficient les créanciers en cas de réorganisation du capital de sociétés débitrices.
Le contentieux à l’origine de l’affaire concernait un litige entre la Commune de Wommelgem et une société anonyme ayant obtenu une concession de travaux publics. Au terme des relations contractuelles, la Commune de Wommelgem détenait une créance à l’encontre de ladite société anonyme.
Néanmoins, après la naissance de cette créance, la société anonyme débitrice avait procédé à une réduction de capital et à une modification de sa forme juridique, passant de société anonyme (SA) à société privée à responsabilité limitée (SPRL).
En vue de préserver sa créance, conformément aux articles 613, 686 et 767 du Code des sociétés, la Commune demandait une nouvelle garantie par la constitution d’une sûreté.
Or, suite notamment à leur modification par la loi du 22 novembre 2013 modifiant le Code des sociétés, concernant les garanties des créanciers en cas de réorganisation du capital, ces dispositions prévoyaient que seuls les créanciers d’une SA (et non d’une SPRL) dont la créance faisait l’objet d’une réclamation en justice ou par voie arbitrale avaient la possibilité d’exiger une sûreté en cas de réduction effective de capital.
En d’autres termes, seuls les créanciers d’une SA qui décidait de réduire son capital (sans modifier sa forme) pouvaient recourir à cette garantie tandis que les créanciers d’une société ayant une autre forme juridique (et qui décidait de réduire son capital) étaient privés de cette possibilité.
Dans son arrêt n° 91/2016 du 9 juin 2016, la Cour Constitutionnelle estime que cette différence de traitement n’est pas raisonnablement justifiée.
En effet, selon la Cour, « eu égard à l’objectif de protection des créanciers poursuivi par le législateur, cette différence de traitement ne repose pas sur un critère distinctif pertinent et produit des effets disproportionnés pour les créanciers des sociétés privées à responsabilité limitée » (B.1O.4).
Ce faisant, la Cour Constitutionnelle renforce les garanties des créanciers confrontés à la réorganisation du capital de la société co-contractante et leur permet d’exiger une sûreté en cas de réduction du capital, quelle que soit la forme de ladite société débitrice.
La Cour déjoue au passage les stratégies de certains co-contractants des pouvoirs publics qui auraient pu tenter de recourir à une réduction de capital, éventuellement accompagnée d’un changement de forme sociale, pour échapper à leurs obligations.